Quels sont les fondamentaux d’une gestion constructive des relations sociales en entreprise?

Quels sont les fondamentaux d'une gestion constructive des relations sociales en entreprise?

Dans le domaine des relations sociales, les facteurs qui y interviennent étant multiples et chaque situation étant spécifique, il n’existe pas de “solution idéale” (la solution miracle?) applicable en toutes circonstances. Cela étant, une attention soutenue et simultanée aux éléments suivants constitue certainement les prémices favorables à des relations sociales saines et à un dialogue social constructif.

Le projet d’entreprise & les relations sociales

Il n’est pas de vent favorable pour celui qui ne sait où il va.

Sénèque

Le projet d’entrepise est la mise en commun des projets, des idées, des ambitions et des envies des dirigeants. Il englobe la mission de l’entreprise, ses valeurs fondamentales, les défis qu’il doit relever et ses promesses (clients, salariés, dirigeants). La finalité du projet d’entreprise: une vision partagée.

L’objectif d’une vision partagée est d’aboutir à une véritable définition non seulement de la stratégie à moyen terme, mais aussi des objectifs à atteindre et du plan d’action à mettre en œuvre pour atteindre ceux-ci.

Au-delà de ses dimensions stratégiques et opérationnelles, le projet d’entreprise comporte une dimension managériale forte et représente un élément central de l’identité et de la culture en vigueur dans la société.
En un mot, de son ADN.

Impacts de l’ADN de l’entreprise sur les relations sociales

Outre une probité irréprochable de ses gestionnaires – dont le respect du droit social tant au niveau de la lettre que de l’esprit -, l’impact du projet d’entreprise sur les relations sociales est lié tant à son contenu qu’à ses qualités et notamment:

  • la clarté de ce projet d’entreprise;
  • la façon dont il est partagé et connu de tous;
  • son appropriation par chacun;
  • les valeurs mises en avant et notamment: l’intégrité, le respect, la confiance, la coopération, le partenariat.

Pas de relations sociales constructives sans dialogue social

Le dialogue social c’est:

  • un moyen d’échange, d’expression des contradictions
  • oser donner son point de vue
  • le but n’est pas de convaincre
  • n’est pas absence de contestation
  • ne vise pas le consensus
  • apprendre à dire / vivre en désaccord
  • partager des points de vue contradictoires

L’objectif du dialogue social doit être de penser ensemble «de sorte à agir avec intelligence» David Bohm.

10 facteurs clés de base d’une gestion constructive des relations sociales

Passé le cap d’un projet d’entreprise qui constitue un terreau favorable à des relations sociales constructives et l’animation du dialogue social, les 10 aspects suivants nécessitent un pilotage adéquat:

1 – La place et le respect de l’être humain

Le contenu de la présente démarche étant essentiellement axé sur l’être humain, il ne saurait être exempt d’humanisme. Même si cela nous convient et ravira ses partisans, c’est cependant sans angélisme ni naïveté car dans le domaine concerné, cette position philosophique n’est pas une fin en soi mais un moyen. Elle facilite la nécessaire prise en compte du facteur humain pour atteindre au mieux les buts de l’entreprise et par là-même ses impératifs de rentabilité, mais elle ne saurait constituer la finalité ultime des décisions de gestion.

Au-delà de cette considération de fond, pragmatiquement, si la structure de l’entreprise ne prend pas suffisamment en compte les aspects humains, ils seront tôt ou tard convertis en revendications individuelles puis collectives. Celles-ci seront rapidement relayées par les organisations syndicales dont c’est la vocation première, ce qui confortera leur rôle dans l’entreprise au détriment de la structure hiérarchique. Comme l’a souvent répété M. Robert Wauters[1] : « les représentants du personnel sont des partenaires économiques et des concurrents sociaux ! ».


[1] Robert Wauters, licencié en Sciences Commerciales et Financières, a notamment occupé les fonctions de membre du Comité de Direction en charge des Relations humaines et sociales de Glaverbel, de directeur des Relations syndicales à Belgacom, de « démineur » social à la Sabena et de consultant en relations collectives. Il a par ailleurs largement contribué à affiner la réflexion sur le contenu de cet article

2 – Le système de gestion des ressources humaines (GRH)

Les différentes composantes du système de GRH doivent manifester les principes de base suivants : transparence et clarté, objectivité maximale, équité externe[1] et interne[2] de traitement entre les personnes, justice procédurale[3] et enfin, uniformité d’application dans toute l’entreprise.

Le système comprendra notamment une gestion prévisionnelle des compétences et des effectifs, des critères de recrutement et de rétention, des moyens d’évaluation individuelle et collective, un processus d’évolution et de développement des personnes. Ce dernier aspect sera complété d’une politique de formation tant en termes de savoir-faire que de savoir-être, ce qui permettra de développer les compétences individuelles et donc, l’employabilité.


[1] Equité externe = par rapport à des situations semblables hors de l’entreprise

[2] Equité interne = appliqués de façon identique entre les différents membres du personnel d’une même entreprise

[3] La justice procédurale concerne la perception de justice en regard des règles et des procédures d’allocation utilisées notamment pour déterminer la rétribution

3 – Le relationnel

Dans nombre de situations, l’autonomie, la responsabilisation, l’adhésion à la démarche de l’entreprise constituent des facteurs qui soutiennent voire stimulent la motivation individuelle, un engagement fort ou plus élevé que d’ordinaire. La motivation et l’engagement – qui ont un impact important avéré sur l’efficience de l’organisation – sont essentiellement basés sur le dialogue, la coopération, la concertation, le partenariat, en bref, sur la « co-élaboration »[1] au lieu de la simple collaboration et ce, à tous les niveaux de l’entreprise.


[1] Robert Wauters, licencié en Sciences Commerciales et Financières, a notamment occupé les fonctions de membre du Comité de Direction en charge des Relations humaines et sociales de Glaverbel, de directeur des Relations syndicales à Belgacom, de « démineur » social à la Sabena et de consultant en relations collectives. Il a par ailleurs largement contribué à affiner la réflexion sur le contenu de cet article

4 – L’exercice de l’autorité

Si, confronté à un événement tel qu’un incendie, un risque imminent d’explosion ou d’accident, il est indispensable de faire preuve d’autorité, la majorité des situations ne nécessite pas cette façon de mener les Hommes. A l’opposé, le « laisser-faire » n’est pas non plus la panacée. L’une et l’autre attitude sont généralement contreproductives.

Pour être efficace sur le long terme, l’exercice de l’autorité doit être juste, ni laxiste, ni rigoriste, adapté aux circonstances, dans le respect des droits et devoirs réciproques. En d’autres mots, il convient de faire preuve d’assertivité, c’est-à-dire, de s’exprimer et de défendre ses droits sans empiéter sur ceux des autres, d’avoir une attitude de fermeté par rapport aux événements et ce que l’on considère comme acceptable ou non.

5 – La hiérarchie

Le rôle des cadres, à tous les niveaux – y compris les responsables de proximité, de terrain -, est d’assurer la gestion des techniques d’organisation utiles au fonctionnement de l’entité dont ils ont la responsabilité.

Leur impact sur les relations sociales est conditionné par la façon dont ils manifestent les propriétés suivantes : cohésion et loyauté, crédibilité, une certaine autonomie, des capacités relationnelles, des capacités d’écoute et d’expression, une gestion des problèmes par niveau et par la personne directement concernée, un équilibre des rôles par rapport aux représentants du personnel.

6 – La communication

En matière de relations sociales, le contenu de la communication vise à donner un sens à la contribution de chacun et permet la compréhension de la situation, de son contexte, de son environnement ainsi que des perspectives positives ou négatives.

À travers toute l’organisation, tant à l’égard de la hiérarchie que du personnel et de ses représentants, la communication sera verticale et transversale, bidirectionnelle, fluide, complète, fiable, congruente, permanente et pédagogique.

7 – Les délégués syndicaux et les délégués du personnel

Dans notre système de relations sociales, les délégués syndicaux et les délégués du personnel ont un rôle majeur, à multiples facettes, et l’entreprise qui souhaite avoir des interlocuteurs pertinents attend notamment d’eux des compétences d’analyse, de compréhension des situations et de leur contexte, de proposition, d’expression tant à l’égard de l’entreprise, de la hiérarchie que de leurs collègues ou mandants.

Les délégués syndicaux et les délégués du personnel doivent pouvoir agir dans le cadre de règles claires, connues et appliquées uniformément dans l’entreprise, partout et par tous. Ce sont aussi des mandataires formés – au besoin par l’entreprise –  qui exercent entièrement leur(s) mission(s), sans privilège, ni préjudice et qui sont traités avec la même rigueur que les autres membres du personnel.

8 – Le suivi du climat social

Le climat social est une expression qui renvoie à la météo et, comme celle-ci, les entreprises vivent des périodes de troubles ou de calme. Il est donc intéressant de pouvoir suivre son évolution, de l’interpréter et si possible, de façon proactive, d’adopter les mesures susceptibles de le stabiliser voire de l’améliorer et donc, d’en limiter les conséquences négatives.

L’évolution du climat social peut être partiellement objectivée par  le suivi de systèmes d’évaluation, notamment de la motivation ou de la satisfaction du personnel, et par le suivi d’indicateurs spécifiques – absentéisme, qualité, productivité -, l’ensemble de ces données étant réunies dans un tableau de bord spécifique.

9 – Une veille sociale

Dans de nombreux domaines, il ne nous est pratiquement pas possible de connaître tous les éléments pertinents à la décision, d’anticiper toutes les options possibles mais aussi leurs conséquences et quand bien même, d’en maîtriser totalement leur déroulement[1].

Les « incidents » sociaux sont des symptômes de dysfonctionnement et constituent une opportunité d’évolution de l’organisation pour autant que nous prenions la peine de les relever, de les analyser et d’appliquer les conclusions qui en découlent non seulement par une réaction à court terme (curative), mais surtout par des ajustements pertinents qui auront un impact à moyen et long terme (préventifs).


[1] Voir à cet égard le concept de « rationalité limitée » développé par Herbert A. Simon in J. Igalens et C. Loignon « Prévenir les conflits et accompagner les changements ; l’observation sociale au service des entreprises et des administrations », Ed. Maxima Laurent Du Mesnil, 1997 pg 34 ainsi que M. De Coster, A. Cornet et C. Delhaye, « Sociologie du travail et gestion des ressources humaines », De Boeck, 1999 pg 187

10 – La négociation sociale

En complément de la concrétisation des points évoqués ci-avant, des relations sociales performantes nécessitent des négociateurs, non seulement qui connaissent les principes de négociation, leurs limites personnelles et celles du mandat mais surtout, qui recherchent un résultat sans perdant.

Conclusion

L’entreprise a les syndicats qu’elle mérite.

Robert Wauters

Si les concepts évoqués ne sont pas exhaustifs, leur concrétisation a incontestablement un impact sur le moral, la motivation, les comportements de l’encadrement, du personnel, des acteurs syndicaux et sur le degré de conflictualité.

Nous pouvons par ailleurs ajouter que le conflit est rarement totalement absent, qu’il peut parfois être exacerbé par la volonté d’une des parties de rétablir un certain équilibre du pouvoir et enfin, qu’il constitue une opportunité d’évolution.

Les entreprises où les points d’attention développés ci-avant sont mis en œuvre depuis un certain temps, de façon proactive, vivent des relations sociales plus favorables à des rapports équilibrés entre les interlocuteurs et plus respectueuses de l’intérêt de toutes les parties, ce qui contribue à l’optimalisation de leur efficience économique et sociale.

Enfin, des rapports sociaux de ce type reposent sur la confiance. Celle-ci met du temps à s’établir, est relativement fragile et nécessite une attention permanente.

La confiance se gagne en gouttes … et se perd en litres.

Jean-Paul Sartre

Les entreprises, qui veulent évoluer dans le domaine des relations sociales, s’interrogeront utilement sur la meilleure façon de concrétiser, dès que possible, les différents items évoqués, de telle sorte qu’à terme, elles soient mieux positionnées tant dans leurs rapports quotidiens avec les représentants du personnel, que lors de négociations sociales futures qui ne manqueront pas d’intervenir ou encore, lors des prochaines élections sociales.

Vous trouverez ma présentation sur ce sujet ici

NB: extrait de l’ouvrage “Les relations sociales en entreprise” chez Wolters Kluwer

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Comment puis-je vous aider?

J’accompagne les personnes et les entreprises confrontées à des tensions interpersonnelles ou à des conflits, externes ou internes, avec ou sans représentants syndicaux, et qui veulent évoluer.

Du fait de ma carrière professionnelle, j’ai une expertise particulière en matière de concertation sociale. En effet, j’ai été actif dans le monde syndical pendant 20 ans (dont 14 comme juge social) avant de suivre une licence post universitaire en gestion des ressources humaines puis d’être actif en tant qu’indépendant dans ces domaines depuis plus de 20 ans.

J’interviens comme indépendant pour des missions temporaires de:

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